Vivre la ruralité
La vision politique de l’aménagement d’un territoire quelle qu’elle soit manque souvent de clarté́ pour tout à chacun. Le projet de lotissement sur Mont Clergé est un exemple parmi d’autres.
Les constructions neuves sur des zones jusque-là naturelles ou agricoles commettent des dégâts irréversibles sur les sols ainsi artificialisés. Une fois recouvert de béton ou d’un autre substrat minéral, il devient difficile de restaurer les sols, de les revivifier et de les rendre à nouveau capable d’accueillir une vie animale ou végétale.
Pour beaucoup de nos concitoyens tout semble se décider sans y être associer et aussi parce qu’à Jonquières au fil du temps les projets de lotissement changent d’endroit sans qu’une logique apparaisse clairement établie.
On “fabrique“ un PLUi (Plan Local d’Urbanisation Intercommunal) que peu de personnes connaissent et surtout consultent ou prennent le temps de consulter (remercions “ARPEJE“ pour son information sur le Mont Clergé) avec des zones de territoires potentiellement à urbaniser. Même si des réunions publiques ont été consacrées à son élaboration, il reste dans un domaine de compétence pour initiés. Il est vrai que rien n’est caché, tout est consultable, la moindre parcelle d’un territoire donné est ainsi définie, codifiée. Des réunions ont été faites, toutes les questions ont pu être posées, c’est aussi un fait. De par son développement, son rayonnement, son dynamisme économique notre territoire de l’ARC prétexte un besoin de développer son offre d’habitat. Disons avec force que le lotissement est la pire des solutions, de nombreuses études le soulignent.
Voici exposé mais parmi d’autres, 5 bonnes raisons de bannir le lotissement :
- la division en petites parcelles, organisée par des haies souvent mortes, nuit aux trames vertes et bleues,
- l’architecture proposée n’a aucune originalité pour en diminuer les coûts, regardons autours de nous, Armancourt, Lacroix Saint Ouen pour ne citer qu’eux,
- les maisons occupent de plus en plus de place, préférant l’étalement à la verticalité, artificialisant plus de terres,
- la multiplication des maisons entraine un allongement des voiries et des réseaux et augmentant les frais à la charge des collectivités,
- l’emprise sur la Surface Agricole Utile diminue la capacité de résilience de la commune et d’absorption du CO2...
Nous avons eu (et encore) l’étalement des zones commerciales et industrielles (Margny les Compiègnes) qui-là ne présentent vraiment aucune esthétique architecturale, ne laissent pas franchement la place aux piétons, sont étalées sur des espaces gigantesques, identiques et sur des kilomètres nous avons des entrepôts-magasins sans aucune recherche architecturale qui se succèdent. On y va essentiellement en voiture dans ces méga zones commerciales. On passe de l’un à l’autre en allant d’un parking immense à un autre parking immense, un désastre écologique, tout le monde peut en convenir. A cela se rajoute désormais et en rase campagne les entrepôts Amazon, mettant ainsi en péril nombre d’enseignes de ces mêmes zones commerciales précédemment citées, impossible de ne pas évoquer les difficultés économiques des commerces de centre-ville.
Que nous disent les textes ; que pour pouvoir ouvrir à l’urbanisation des zones non équipées, la collectivité́ doit démontrer que le tissu urbain existant n’offre pas d’autres possibilités pour la construction.
Est-ce le cas à Jonquières ? Ma réponse est catégorique : NON ce n’est pas le cas.
La compétition des collectivités pour la maîtrise de leur(s) espace(s) est une constante historique. Si l’aménagement du territoire a été conçu en France comme un processus de modernisation de l’action publique et d’approfondissement de la démocratie via la décentralisation depuis les années 1980, il n’est aucunement une fin en soi. Les politiques d’aménagement du territoire ne doivent pas mésestimer le risque de distorsion durable entre l’État, les collectivités territoriales et la société civile, c’est à dire à notre petite échelle, les habitants de notre commune. Il est alors indéniable que notre modèle territorial est écartelé entre le contribuable, l’usager, l’électeur et le citoyen que nous sommes tout à la fois et tour à tour.
De plus, il nous faut distinguer aménagement du territoire, urbanisme, architecture et sociologie d’un territoire ce qui nécessite des compétences qui sont indépendantes mais indissociables les unes des autres dans la réalisation de projets urbains. Constatons pourtant que des décisions sont prises par des personnes n’ayant peu ou prou l’ensemble de ces compétences mais plus parce qu’elles /ont-sont/ le POUVOIR politique. Bien sûr il y a des bureaux d’études. Il est incontestable que l’aménagement du territoire est une action collective et volontaire qui vise, par le moyen d’une transformation de l’organisation spatiale et temporelle de la société, à répondre aussi à des objectifs politiques… Et encore ce n’est pas aussi simple que ce qui est écrit.
On tourne en rond ?
Non, sauf à faire de la participation citoyenne la clé de voute de l’aménagement du territoire, à aller chercher l’information et la formation. Mais c’est compliqué pour nos élus, trop souvent noyés dans un administratif quotidien fastidieux et complexe et qui n’envisagent plus le recours ou trop peu à la participation citoyenne et qui sont persuadés que la légitimité des urnes les délie du reste Perdre de sa prérogative est difficile pour les élus et encore plus difficile quand ils se font réélire sur un temps long leur donnant une sorte d’auto légitimité autocratique. Il n’est pas rare de constater un manque cruel de vision, nous sommes désormais dans une société de l’action, alors tant qu’à faire, nous sommes dans l’action immédiate et sans concertation.
Sur le projet de lotissement, la volonté politique actuelle tend à une certaine systématisation dans la production des espaces urbains, fondée sur l’imposition au projet d’un maximum de contraintes programmatiques afin d’en assurer la réalisation dans des délais courts pour ne pas entraîner des déficits dans le bilan de l’aménageur, l’espace ainsi aménagé en sort amoindri dans son rôle de lieu de mémoire et d’échanges, par trop pensé en des formes de bâtis répondant souvent plus aux intérêts individuels des promoteurs, face aussi à la demande des maires de plus en plus pressante, de lancer des “ projets urbains ” comme démonstration et parfois aussi comme caution d’une politique de l’action.
Vous imaginez le temps perdu en palabres s’il fallait demander l’avis de chacun ? Inimaginable cacophonie pour nos élus, ici ou ailleurs, avouons-le regardons autours de nous, c’est partout la même chose !!!
Ainsi pour revenir au projet de lotissement il a été ouvert une adresse mail sur laquelle vous pouviez écrire vos remarques. Mais soyons réalistes, cette adresse mail ne servira qu’à la contestation dû dit projet, donc par ricochet à en évaluer le degré de contestation, voilà à quoi se résume la participation citoyenne. Et puis le tout sera rapidement enterré.
Je l’ai déjà exprimé, des personnes ont le droit d’avoir envie de venir vivre dans notre charmant village, nous nous devons de les accueillir... mais comment, pourquoi et où ? Posons-nous collectivement la question et proposons mais dans le temps long, chacun pouvant donné son point de vue mais sur un dossier préparé, étayé et solidement étudié.
Alain Brousse
13 novembre 2022