La guerre en Ukraine

Pour la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale, la Russie, grande puissance nucléaire déploie ses capacités militaires dans une guerre d’agression contre un pays européen, l’Ukraine. Le déclenchement des hostilités dans la nuit du 24 février 2022 marque, sans aucun doute possible, un tournant dans l’histoire du XXIe siècle. 

Mais au-delà de ces considérations évidentes, comment raconter la guerre vécue par les ukrainiens ? 

Je l'ignore parce que je n'ai pas vécu de guerre, sans doute parce que la guerre constitue une expérience dont la commotion touche à l’inénarrable et confrontés à la barbarie nous nous heurtons à l’impossibilité de dire le mal, de trouver les formulations appropriées pour décrire la cruauté. La parole désarticulée et inintelligible témoigne de l’impuissance du langage qui peine à trouver une démarche cohérente pour dire l’indicible de ce que vivent les populations confrontées à cette guerre ignoble. 

Je veux dire mon profond respect pour toutes ces personnes qui n’ont rien demandé et qui souffrent dans leurs âmes et leurs chairs. Je pense à ces enfants qui découvrent la réalité des chars et des militaires et qui désormais passent des journées entières terrés dans des caves. Je pense à ces familles déchirées obligées de se séparer quand des femmes quittent leur pays pour protéger les enfants pendant que maris, frères et oncles vont défendre leur pays.

J’exprime tout mon chagrin devant cet immense désastre. 

Je découvre que l’écriture de la guerre s’accompagne de questionnements de nature à mettre en évidence l’impuissance du langage à exprimer une réalité a priori ineffable.

Tant de sottises, tant d’horreurs aussi, vont-être dites, par les uns et les autres parce qu’il faut bien se démarquer, trouver la petite phrase qui fait de vous la vedette médiatique dérisoire d’un jour. 

Nous entendrons la rhétorique, les bons mots, les pensées profondes, les mesures toutes faites. Il faut dire haut et fort que l’analyse rationnelle de la folie de la guerre ne peut avoir pour objectif de justifier l’injustifiable. La représentation du chaos a ceci de particulier qu’il nourrit l’ambition de bâtir pour certains leur histoire personnelle. Ici chez-nous comme ailleurs, méfions-nous des discours théoriques, révisionnistes qui ne servent que ceux qui les produisent et qui sous des prétextes douteux négligent,oublient totalement la souffrance d’un peuple.

Alain Brousse

Le 4 mars 2022